lundi 10 septembre 2012

Intellos, savants, docteurs: les personnages "intellectuels" en littérature!



Bonjour à tous!

Après trois articles consacrés à des critiques de livres, je vous propose aujourd'hui de revenir à la formule plus ''classique" de ce blog, avec un article "thématique" (Dieu que je n'aime pas ce mot). La rentrée est déjà bien entamée, et nous voilà (ou presque) de retour sur les bancs de l'école: l'idéal pour découvrir des figures très importantes en littérature, puisque très présentes, celles des personnages dits "intellectuels". En effet, il n'est pas rare de retrouver, entre le héros et la belle demoiselle (ou le beau damoiseau, c'est selon), un personnage un peu différent des autres, celui que l'on surnomme l'intello, le monsieur je-sais-tout, le cerveau, un personnage bien utile pour démêler les situations les plus complexes, tantôt attachant, tantôt énervant. Voici donc un petit tour d'horizon de ces personnages assez particuliers qui, comme vous allez le constater, ont eu leurs heures de gloire mais aussi de moqueries...

Chez les enfants: les petits intellectuels...


Commençons par nous pencher sur le cas des personnages "intellectuels" dans la littérature enfantine. Dans ce genre de littérature, les personnages sont assez souvent "stéréotypés'',  dotés d'un ou deux traits de caractère qui permettent aux lecteurs de les identifier très vite: le courage, la peur, la gentillesse, la méchanceté, la stupidité... Et l'intelligence. Il n'est donc pas rare de trouver des personnages "intellectuels" parmi les héros enfantins. On peut noter de nombreuses ressemblances entre ces personnages: souvent, leur physique est plutôt disgracieux, ou du moins banal, parfois affublés de lunettes, et on retrouve parmi leurs atouts majeurs une pléiade de livres ou de références, qu'ils dégainent le moment venu, expliquant à leurs petits camarades non initiés toute l'importance de la connaissance. Certains de ces personnages peuvent être également agaçants, tellement leurs connaissances peuvent vous faire passer pour le dernier des imbéciles. Voici trois exemples de petits "intellos":


-Tout d'abord Artemis Fowl, le héros de la série du même nom (il est d'ailleurs assez rare de retrouver un intello comme héros d'une saga!). Ce petit génie, âgé de 12 ans lorsque démarre la saga, a décidé de faire profiter le mal et le crime de son intelligence hors du commun. Artemis a écrit des livres, des traités, il est terriblement intelligent, mais aussi plutôt arrogant (une arrogance qui tend à disparaître avec les volumes). Ce personnage est unique parmi les intellos de la littérature pour enfant, et ce à plusieurs niveaux: tout d'abord, il est le héros de l'histoire, un héros qui se tourne du côté du crime, et non pas du bien, comme il pourrait cependant le faire; malgré son jeune âge, il bénéficie également d'une certaine relativité de mouvements et d'action, comme si il était un adulte. Son intelligence semble à la fois lui ouvrir des portes (celui du Peuple des Fées, notamment), mais elle est également un frein pour lui, car elle l'aveugle parfois. Une saga avec un héros assez atypique, en somme...

(le tome 1 d'Artemis Fowl)


-Dans la série des Orphelins Baudelaire de Lemony Snicket, les trois personnages principaux, à égalité en terme d'importance, sont Violette, Klaus et Prunille. Pour se sortir des situations, même les plus compliquées, chaque enfant a une sorte de "don": Violette est une sorte de Mac Gyver, capable de transformer trois trombones et un élastique en un sèche-cheveux; la petite Prunille a des dents très acérées, un outil très utile qui sortira plus d'une fois les enfants du pétrin; enfin, Klaus est le petit génie de la famille, un très grand lecteur dont les connaissances très vastes touchent aussi bien à l'histoire du dé à coudre qu'à la vie du saumon d'élevage. C'est donc à Klaus que je vais m'intéresser: si vous saviez le nombre de choses que j'ai appris grâce à ce personnage! Klaus connaît énormément de choses, et ne s'épanouit réellement qu'entouré de livres, même les livres les plus étranges: de nombreuses fois, on le voit s'attrister de l'absence de livres chez l'un ou l'autre de leurs nombreux tuteurs! Klaus est un véritable intellectuel, capable de sortir dans les moments les plus improbables des références à des livres ou des auteurs. Cependant, il se démarque des autres personnages "intellectuels" des rayons enfants: en effet, malgré sa "supériorité" sur ses soeurs au niveau intellectuel, il reste très humble envers elles, car elles possèdent également des dons que lui ne possède pas. Une sorte d'équilibre se crée donc entre les trois enfants, rendant Klaus très sympathique.

(Klaus, le frère lecteur)


-Enfin, terminons avec l'une des "intellos" les plus connues de la littérature pour enfants, Hermione Granger, la très célèbre amie d'Harry Potter. Hermione a un statut très particulier dans l'univers du jeune sorcier: elle est d'abord la seule fille dans le trio de tête formé d'elle, d'Harry et de Ron. De plus, elle est "sang de bourbe", issue d'une famille de moldus, une origine qui lui créera de nombreux problèmes. Pour compléter le tout, Hermione est aussi une grande lectrice, grande travailleuse à l'école, se démarquant des autres par la très grande qualité de son travail et son incroyable assimilation des informations. Avant d'aider Harry à vaincre Voldemort, elle le tirera, ainsi que Ron, déjà des griffes des effroyables examens de Poudlard en leur prêtant ses notes, ou en les laissant parfois recopier sur ses devoirs. Hermione est un personnage très apprécié, pourtant, elle était présentée au départ comme une madame-je-sais-tout très exaspérante (comme lors de la première leçon de potions avec Rogue, ou dans la scène désormais culte où les jeunes sorciers apprennent à faire voler des plumes), qui ne semble s'entendre avec personne, et qui fatigue tout le monde avec son savoir. En réalité, ce savoir sert de carapace à Hermione, qui craint en partie de ne pas être acceptée de la communauté magique à cause de ses origines, comme si elle essayait de prouver sa légitimité. Puis, elle deviendra un atout indispensable à Harry pour se sortir des situations les plus complexes... Hermione est donc passée d'agaçante à touchante, d'épuisante à indispensable!

(la parfaite incarnation de la première de la classe...)




De Molière au Docteur Watson, l'étrange cas du docteur et du médecin...



Parmi les figures les plus emblématiques du savant en littérature, on retrouve en bonne place celle du médecin/docteur, un personnage très présent, et ce dès l'apparition de cette profession. Cependant, si aujourd'hui les médecins sont des symboles dans notre société, symbole d'un certain savoir et d'une profession ne laisse pas de place à l'erreur, ils ont longtemps été dénigrés en littérature.


Molière fut l'un de ceux qui exprimèrent leur mépris des médecins: pour lui, ces hommes qui prétendaient pouvoir guérir les autres n'étaient que des charlatans. On retrouve donc dans ses pièces des médecins ridicules, comme dans le Malade Imaginaire, où le médecin est vu comme un profiteur, qui abuse de son patient en lui trouvant sans cesse de nouveaux maux et en lui prescrivant toujours plus de soins; dans le Médecin malgré lui, Molière nous montre que n'importe qui peut devenir médecin et tromper son monde... Un réel mépris du médecin qui n'est cependant pas particulier à Molière.

(Molière détestait les médecins, qu'il ridiculisa dans plusieurs de ses pièces)


Après les Lumières et les grands progrès scientifiques du 18ème et 19ème siècles, les savants rencontrèrent un nouveau succès auprès du public: on peut citer Louis Pasteur, véritable idole de son vivant. Les médecins, en revanche, ne bénéficièrent pas du même éclat. Si on trouve des figures comme Horace Bianchon, un médecin plutôt respectable de la Comédie Humaine de Balzac, on a aussi le Docteur Pascal de Zola écrasé par la fatalité de la folie héréditaire; plus tard, dans la pièce Knock ou le Triomphe de la médecine, de Jules Romains, le médecin est cette fois encore un habile personnage qui parvient à convaincre tout le monde de se faire soigner... Un personnage entre science et charlatanisme!

(Louis Jouvet dans Knock)


Au Royaume-Uni, Sir Arthur Conan Doyle choisit comme camarade aux aventures de Sherlock Holmes le non moins célèbre Docteur Watson, chargé de raconter les prodiges de son compagnon. Le Docteur Watson est là un médecin plus proche de notre conception actuelle du médecin: il aide souvent Sherlock à analyser des corps (lorsqu'il y en a), et fait aussi des observations médicales sur sa demande. Malgré tout, le Docteur Watson reste une figure plutôt mineure du savoir, écrasé par l'incroyable et implacable logique de son ami.


(Sherlock et Watson, incarnés par Benedict Cumberbatch et Martin Freeman)

Pour conclure, nous pouvons dire que le médecin n'est pas le personnage le plus gâté en littérature, le plus souvent dénigré. Il regagne cependant ses lettres de noblesses à la télévision, avec des séries comme Urgences, ou encore Dr House...

Savant fou ou scientifique génial?


Lorsque l'on parle de savoir, on pense souvent au "savant", le détenteur du savoir. Par déformation, le savant est devenu une entité plutôt scientifique, et, en littérature, on a deux images du savant: celle du savant fou, et celle du scientifique fantastique, deux images qui s'opposent, mais où la frontière reste mince...


Le mythe du savant fou est né avec des romans comme Frankenstein ou Dr Jekyll et Mr Hyde, des romans dans lesquels les savants étaient poursuivis ou détruits par ce qu'ils avaient inventé. Plongés dans la science jusqu'au cou, ils ont dépassé certaines limites qui les ont amenés aux portes de la folie: Frankenstein est harassé par la poursuite sans fin de sa créature, complètement affaibli. Bien souvent, les savants réalisent trop tard qu'ils sont allés trop loin, et ils ne peuvent plus reculer. Cette image n'a fait que s'amplifier avec le cinéma d'horreur: on trouve de nombreux savants fous dans ce type de cinéma, affublés d'une blouse blanche et longue, les cheveux hirsutes et les yeux exorbités...

(l'affiche de l'un des premiers films tirés de Dr Jekyll et Mister Hyde)


En France aussi, nous avons nos savants fous: dans la Recherche de l'Absolu, un des romans de la Comédie Humaine, Balzac nous dépeint un scientifique, Balthazar Claës, qui se plonge dans des recherches qui lui accaparent tout son temps et son argent, au point qu'il ne voit même pas sa famille sombrer dans la ruine et sa femme dépérir. Ici, Balzac oppose la science, qui détourne l'homme de son chemin, à la religion, l'incarnation d'une vie heureuse et simple. La science et le savoir sont vus ici comme des dangers.

Mais il existe aussi des scientifiques géniaux, notamment dans les romans de Jules Verne, où les scientifiques sont des personnages récurrents (Vingt Mille Lieux Sous Les Mers, l'Île Mystérieuse...), ou encore dans les comics, comme Watchmen avec le Docteur Manhattan, ou Hulk, avec Bruce Banner, les séries TV avec le Docteur Who...

Attardons-nous quelques minutes sur les comics; souvent, les scientifiques accèdent à leur pouvoir suite à une expérience qui tourne mal: le Docteur Manhattan devient bleu, et Bruce Banner vert. Les méchants aussi ont leurs scientifiques: le Bouffon Vert dans Spider-Man.

(Suite à une expérience qui tourne mal, Bruce Banner craque son slip, et devient Hulk)


Comme je vous le disais tout à l'heure, la frontière entre génie et folie est souvent mince. Je choisis ici deux exemples tirés du cinéma:

-Dans Sleepy Hollow, adapté librement de la nouvelle de Washington Irving, Ichabod Crane est un scientifique plutôt en avance sur son temps, puisqu'il utilise des méthodes d'investigation digne des Experts à Miami, des Experts à Manhattan et des Experts à Dunkerque. Il est un génie, mais en même temps, on ne peut nier qu'il possède une petite dose de folie qui rend ce personnage si attachant!

(le loufoque Ichabod Crane)


-Enfin, dans un autre film de Tim Burton, Edward aux Mains d'Argent, Vincent Price incarne le père d'Edward. Un peu comme Frankenstein, il crée un homme, mais meurt avant de l'avoir achevé... Ce vieux savant ressemble un peu à Gepetto, se fabriquant un fils qu'il aime et éduque...

(Tim Burton et Vincent Price sur le plateau)



Qu'il soit jeune ou vieux, sage ou fou, "l'intellectuel" compte parmi les personnages les plus utilisés en littérature, mais aussi les plus appréciés grâce à toutes les facettes qu'il propose au lecteur et à l'auteur. Personnellement, j'adore Klaus, des Orphelins Baudelaire! Et vous?

AnGee Ersatz*

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3 commentaires:

  1. OH un excellent article. C'est vraiment bien pensé et cela tombe bien avec la rentrée scolaire/littéraire. Je t'en félicité, tes efforts sont bien palpables ^^
    De ma part, j'aurai choisi Hermione Granger comme personnage 'intello' préféré, parce qu'elle me ressemble énormément XD voilà

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  2. Superbe article ! Personnellement je suis fan du Dr Watson et de Hulk. Tu m'as aussi donné envie de lire les Orphelins Baudelaire, c'est une oeuvre qui m'a l'air sympa. Il y avait un film dessus non ? Il me semble l'avoir vu mais il y a très très longtemps ! J'ai lu Knock ou le triomphe de la médecine la semaine dernière pour le baby challenge théâtre de livraddict ^^ La médecine n'est pas dépeinte sous son meilleur jour c'est clair. Pour finir, j'ai beaucoup aimé ton texte sur Molière. Grande fan, je fais mon mémoire sur lui, ses œuvres sont génialissimes !
    A bientôt ;)

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